Le narrateur, sans identité précise, vit seul, travaille seul, dort seul, mange seul ses plateaux-repas pour une personne comme beaucoup d'autres personnes seules qui connaissent la misère humaine, morale et sexuelle.
C'est pourquoi il va devenir membre du Fight club, un lieu clandestin ou il va pouvoir retrouver sa virilité, l'échange et la communication. Ce club est dirigé par Tyler Durden, une sorte d'anarchiste entre gourou et philosophe qui prêche l'amour de son prochain.
Un chef d’œuvre absolu pour sa mise en scène, son jeu d'acteur, ses répliques tout y est magnifique.
Fight Club est à la base un roman de Chuck Palahniuk, publié en 1996, dans lequel le héros fonde un club de combat afin d'évacuer son mal-être. Le roman est beaucoup plus violent et décousu que le film.
L'adaptation cinématographique américaine réalisée par David Fincher est fort réussie …Il dit de son film ceci :
"Il n'y a rien à chasser, à tuer, plus rien à combattre, à explorer où à surpasser dans notre société. Fight Club dénonce l'émasculation des hommes que nous sommes. Nous sommes prédestinés à devenir des prédateurs alors que nous vivons dans une société de pure consommation».
Brad Pitt à son tour dit ceci :
"Aujourd'hui, les gens ne savent plus qui ils sont. Il est donc logique, finalement que certains trouvent la représentation d'eux-mêmes dans les meubles, les bibelots et tous les trucs qu'ils achètent. Quelle misère ! Faute d'esprit et d'identité, c'est une quête sans fin du nouveau produit"
D’une certaine manière Tyler Durden veut nous faire entrer au cœur de la violence pour que nous puissions comprendre une grande vérité de l'âme humaine : le sacrifice.
Dans cette scène où Tyler Durden brûle la main du héros anonyme avec de la soude. Jack doit apprendre deux choses de cette expérience.
« Premièrement, rien de ce qui n'est grand ne se fait sans sacrifice ; le savon lui-même, « l'unité métrique de notre civilisation », fut découvert à la suite de milliers de sacrifices humains : « le savon et le sacrifice humain vont main dans la main », dit Tyler.
Deuxièmement, la douleur proprement humaine, le mal de vivre, la douleur pure en somme, cette douleur ne s'apaisera pas par le confort et la sécurité que procure le monde moderne.
« Tu peux pleurer. Tu peux aller à l'évier et laisser couler de l'eau sur ta main, mais tu dois d'abord savoir que tu es stupide et que tu vas mourir. ..Tu peux pleurer, mais chaque larme qui atterrira sur les cristaux de soude sur ta peau fera l'effet d'une brûlure de cigarette… Tu peux utiliser du vinaigre pour neutraliser la brûlure, mais tu dois d'abord t'abandonner »
Il faut utiliser acide pour acide. La douleur est l'issue de la douleur. C'est dans la douleur et le sacrifice de soi, voire dans l'autodestruction que l'on vient à se connaître soi-même.
Dans l'effort de la douleur, le sujet se nie lui-même. Et dans cette constante destruction du sujet, le héros comprend qu'il n'est pas une entité fixe, qu'il n'est pas le seul résidu d'être dans un devenir chaotique, mais qu'il est lui aussi devenir.
« Tu n'es pas beau et unique comme un flocon de neige. Tu es fait de la même matière organique en pourriture comme n'importe qui d'autre, et nous sommes tous du même tas de compositions. »
Toucher le fond, ce que Tyler veut apprendre au héros, c'est apprendre que le moi n'existe pas. Le Projet Apocalypse, le projet de Tyler Durden, a pour objectif la destruction de la civilisation moderne.
La civilisation moderne est un artifice qui a pour fin un mensonge : le Moi , l'individualité ; comme réalité ontologique et comme fin éthique. La destruction de cette civilisation permettra de retrouver la nature et sa violence, la douleur sans doute, mais aussi la vérité.
Fight Club, c’est l’histoire d’une génération qui vole en éclats.
Le nihilisme y est abordé d’un point de vue historique : c’est au vu du déclin inexorable de l’humanité, de l’omniprésence et l’omnipotence de la société de consommation, et de la fuite dans le divertissement, que les personnages se voient douloureusement obligés de sacrifier le principe même de vie sur l’autel du non-sens.
Le constat de Fight Club est terrible et s’alourdit de jour en jour : le monde s’use. Les générations d’aujourd’hui n’ont plus rien sur quoi s’appuyer, elles sont à la fois les héritières déchues d’une dégradation inéluctable et les précurseurs d’une révolte intestine ; leur unique préoccupation est l’adaptation et la survie psychologique, qui se traduit par des moyens à la limite de l’insanité. A suivre